Coupe Sudirman 2013
Un des tournois les plus intéressants sur le circuit mondial du badminton est sans contredit la Coupe Sudirman. Non seulement ce championnat du monde par équipe tenu à intervalles biennaux propose-t-il une grande variété de pays, mais il offre aussi l’avantage de mettre en scène les cinq disciplines de notre sport, contrairement aux coupes Thomas et Uber, réservées, elles, aux seules disciplines non mixtes.
La dernière édition de la Coupe Sudirman eut lieu en mai dernier au Stade Putra à Kuala Lumpur, en Malaisie. Les attentes étaient grandes, car ce stade est régulièrement la scène de foules monstres et enthousiastes pour le Malaysia Open ou des événements sporadiques comme le championnat du monde individuel et la Coupe Thomas.
Malheureusement, cette année, les grandes foules ne furent pas au rendez-vous, mais comme pour tout tournoi, nous avons eu droit à de beaux moments. Pour ma part, je pense notamment au plaisir de revoir un Québécois en action sur la scène mondiale. Sauf erreur, la dernière fois que j’ai eu ce plaisir remontait aux Jeux olympiques de Beijing. Il fut agréable de voir Philippe Charron — un mois seulement après le championnat québécois à Saguenay — en action au sein de l’équipe canadienne, d’autant plus que son match de mixte avec sa partenaire Phyllis Chan fut des plus expéditifs. Les Autrichiens en face n’ont rien pu faire d’autre que de subir le match.
Évidemment, un tel tournoi met en vedette les pays dominants de la scène mondiale du badminton, mais je crois qu’un des aspects les plus intéressants d’un tel tournoi est de voir évoluer des joueurs qu’on n’a presque jamais la chance de voir sur le circuit des Superseries. Spontanément, je pense à des joueurs issus de la Turquie, du Vietnam, de la Nouvelle-Zélande, des Philippines et du Kazakhstan. C’est en observant certains de ces joueurs que l’on se rend compte de la profondeur de talent sur la scène internationale du badminton. Il y a vraiment de bons joueurs partout. Comment ces joueurs font pour atteindre un tel niveau dans des pays sans grande tradition de badminton mérite franchement toute mon admiration. Il suffirait que ces pays disposent de plus de ressources pour que l’équilibre actuel du badminton mondial soit bouleversé.
La Chine a évidemment remporté le tournoi malgré des difficultés en quart de finale contre l’Indonésie. Sa finale contre la Corée fut malheureusement décevante, car elle fut à sens unique. La Chine mérite néanmoins les honneurs, car elle présente de très fortes équipes dans les cinq disciplines. Elle est dévastatrice en simple, très forte en mixte, redoutable en double masculin et quasi invincible en double féminin.
Open d’Indonésie 2013
Pas plus de deux semaines après la Coupe Sudirman, il était déjà temps de se rendre à Jakarta pour l’un des plus gros tournois Superseries de l’année, soit l’Open d’Indonésie. Là, rarement les foules font défaut : dès la première heure du tournoi, il y a toujours des fans sur place prêts à encourager tout joueur arborant un drapeau indonésien ou d’autres joueurs spontanément adoptés en raison de leur ardeur au jeu, de leur popularité auprès des jeunes filles ou de leur habileté à mettre les spectateurs de leur côté. Les Indonésiens sont maitres dans l’art de rendre un match somme toute ordinaire en un événement inoubliable. L’ambiance, ça change tout!
Les organisateurs aiment bien faire les choses en grand : chaque année, ils organisent un souper (Welcome Dinner) où les joueurs, officiels et médias sont invités à participer à une fête-spectacle. Chaque année, ils en profitent pour faire parader quelques braves joueurs et joueuses en costume traditionnel. Certains sont si transformés qu’on a peine à les reconnaitre. Quelques autres malheureux sont aléatoirement choisis pour chanter ou pour danser à la demande des animateurs. Évidemment, les médias raffolent de ces photos! Pour nous, photographes, c’est une occasion en or de faire des photos uniques et différentes, malgré qu’il faille courir partout toute la durée de l’événement. À la fin de la soirée, tous les invités reçoivent un joli cadeau. L’année dernière, une flûte fut offerte à tous les convives. Cette année, ce fut un joli batik fait à la main.
L’Open d’Indonésie se caractérise aussi par les innombrables stands qu’ils mettent à la disposition du public à l’extérieur du stade. Des restaurants, des copies géantes de joueurs avec lesquelles se faire photographier, des boutiques de souvenirs, des stands de maquillage, des murs immenses pour écrire des messages d’encouragement à ses joueurs préférés, bref, on pense à tout! Chaque année, il y a quelque chose de nouveau et c’est cela qui est remarquable : on veut toujours innover et faire participer davantage le public. Bref, on veut faire du tournoi une véritable fête du badminton. Voilà, à mon avis, la clé du succès.
Les organisateurs ont même essayé de tenir le tournoi sur six jours au lieu de cinq. Cette formule allonge le tournoi, mais allège les premiers jours où les matches de premier tour doivent être joués. Par conséquent, il fut décidé de n’aménager que trois terrains au lieu des quatre habituels. Conséquence heureuse : plus d’espace pour photographier. Cet espace supplémentaire n’est surtout pas de refus, car il y a toujours beaucoup de photographes à Jakarta. Il faut les voir se masser le long du terrain lors des matches mettant en vedette les meilleurs joueurs indonésiens. C’est la cohue!
Cette année, on prévoyait encore plus de photographes en raison de la retraite annoncée de Taufik Hidayat, un joueur ayant atteint un statut de légende en raison de ses résultats depuis une quinzaine d’années. J’avais déjà eu la chance de constater sa popularité dix ans plus tôt lorsqu’il avait remporté ce même tournoi à Batam, tout près de Singapour. Malheureusement, cette année, Hidayat ne fut pas en mesure de répéter son exploit et perdit dès son premier match face à un Indien. Une cérémonie fut néanmoins organisée en son honneur avant la tenue des finales. Pour ce faire, on avait donné à chaque spectateur, journaliste et photographe présent aux finales un t-shirt — de taille M, pour les curieux — arborant le message We Love Taufik.
Lee Chong Wei remporta encore une fois le tournoi en simple masculin, mais il frôla la catastrophe lors de son premier match l’opposant au jeune Wang Zhengming. Le jeune Wang n’était qu’à un seul point de la victoire, mais ne réussit pas à aller au-delà. Il est inconcevable d’assister à des finales en Indonésie sans qu’au moins une d’entre elles soit remportée par des joueurs de ce pays, n’est-ce pas? Eh bien, encore une fois, Mohammad Ahsan et Hendra Setiawan – une paire très en forme par les temps qui courent – remporta les honneurs en double masculin bien que ne figurant pas parmi les favoris de leur discipline.
Open de Singapour 2013
Le lendemain de l’Open de l’Indonésie, la caravane du badminton prenait la route pour un autre rendez-vous dans une république voisine : Singapour. L’Open de Singapour n’a pas le panache de son prédécesseur – il n’est pas un Superseries Premier – mais il peut aussi offrir de beaux moments si les meilleurs joueurs s’y donnent rendez-vous. Il arrive que ce tournoi soit la victime de nombreux retraits de dernière minute et ce fut malheureusement le cas encore cette année. Tel fut le cas pour de nombreux joueurs de premier plan, dont Lin Dan.
Malgré l’absence de plusieurs vedettes, une bonne foule se rendit au stade et elle fut récompensée par des matches mémorables. Il faut retenir le premier titre en simple masculin pour l’Indonésien Tommy Sugiarto, le fils d’Icuk Sugiarto, le champion du monde de 1983. Le jeune Sugiarto eut à jouer deux matches marathon en fin de tournoi de plus d’une heure chacun pour gravir la première marche du podium.
Je retiens aussi la Chinoise Zhao Yunlei qui a ajouté un autre titre à son énorme collection en remportant le double avec sa partenaire Tian Qing. Rarement ai-je assisté à un tournoi sans qu’elle soit sur le podium! Ahsan et Setiawan ont encore une fois battu Ko Sung Hyun et Lee Yong Dae en finale du double masculin. Mine de rien, c’était la troisième fois que je voyais ces deux équipes s’affronter en finale d’un Superseries — en 2013 seulement! — et le résultat final fut toujours à l’avantage des Indonésiens.
Les organisateurs ont voulu innover cette année en installant des gradins conçus en loges corporatives. Beaucoup ont aimé cette idée, mais j’avoue ne pas partager le même sentiment. Les loges juraient avec le reste des gradins et limitaient la libre circulation de certaines personnes, dont les photographes. De plus, cela me rappelle trop les tournois de tennis où les fans sont légion dans les gradins supérieurs plus éloignés de l’action alors que les loges corporatives à côté des terrains sont à moitié vides. Il y a une certaine injustice là-dedans.
Enfin, le tournoi s’est déroulé en même temps qu’une vague de pollution record. En effet, la république fut prise d’assaut par une brume sèche due à des feux de forêt sur l’île indonésienne de Sumatra. Le degré de pollution atteignit un tel niveau qu’une rumeur courait à l’effet que le tournoi pouvait être annulé en raison de restrictions gouvernementales. La brume sèche était en effet visible même à l’intérieur du stade. Quelques jours plus tard, l’atmosphère s’était nettoyée et le soleil revint en force sur cette magnifique île, mais il était déjà temps de dire au revoir à tout le monde et d’avoir hâte au prochain tournoi.
Yves Lacroix
Photographe officiel de Badminton Québec
Photos offertes gracieusement par Badminton Photo
Court vidéo d’un échange à l’Open d’Indonésie
[youtube id=”9fhm885TGyU” width=”620″ height=”360″]